Numéro (11-17 mars 2004) de
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En Espagne, avant la Constitution de 1978, la formation religieuse catholique était obligatoire pour tous et quel que soit l’âge, car tout citoyen « était croyant et catholique par décret » et parce que la « Sainte Mère l'Église » l’ordonnait. Cette nouvelle constitution, après la mort de Franco, établissait la séparation des Églises et de l'État avec liberté de religion et liberté de conscience. Pourtant, les « Acuerdos del Estado Español » avec le Vatican, bien que provenant de concordats antérieurs à cette Constitution, restent en vigueur. Aussi, dans les établissements scolaires, le catéchisme (catholique) se poursuit et s’est peu à peu consolidé avec des cours donnés par des enseignants payés par l’Etat, mais contrôlés par l’épiscopat, en opposition avec les principes constitutionnels espagnols. Pendant les 25 dernières années, les pouvoirs publics, sous la pression de l’Eglise catholique, ont amené peu à peu la majorité des familles agnostiques à opter pour la participation de leurs enfants aux cours de religion (catholique) afin que ces derniers ne subissent pas de discrimination, quoique l’état espagnol soit laïque et garantisse la liberté de pensée. À partir de la rentrée scolaire 2004-2005, selon la LOCE « Ley Orgánica de Calidad de la Educación », les scolaires, depuis l’entrée à l’école primaire jusqu’au « bachillerato », auront une nouvelle matière obligatoire, l’enseignement de la religion (en 840 heures de cours dont les notes compteront pour l’examen d’entrée à l’Université). Ils devront choisir entre deux options: l’une confessionnelle (catholique) dont le contenu est établi par l’Eglise catholique et enseigné par des professeurs titulaires nommés par les évêques ; et, l’autre, nommée « faits religieux », sera enseignée par les professeurs d’histoire et de philosophie, avec un contenu lui aussi « supervisé » par l’Eglise catholique. Cette dernière option, dite « non confessionnelle », prône dans ses programmes les valeurs religieuses et l’« immoralité » de l’athéisme. Le plus surprenant est que l’Education espagnole va véhiculer un bel exemple d’intolérance et de totalitarisme au travers de la suprématie catholique dans une matière qui aura des répercussions sur l’ensemble des cursus scolaires. Le plus important de cette curieuse dichotomie est de permettre à l’Eglise catholique de maintenir son pouvoir politique, religieux et culturel en Espagne par un système impérialiste d’endoctrinement et de domination, issu de l’Inquisition, utilisant aussi la culture populaire à travers des étapes devenues souvent profanes, mais socialement incontournables, comme la confirmation, la première communion, le mariage, les processions, le jour de congé pour le saint de l’entreprise, de l’établissement scolaire ou universitaire, de la ville, etc.
« Quoique l'Etat espagnol soit laïque »
Pour mesurer l’impact populaire de l’Eglise, il est intéressant de voir comment ont évolué les « dons » à partir des deux cases à cocher sur la déclaration d’impôts, car un 0,5 % des impôts est réparti en fonction du souhait du contribuable : entre 2000 et 2001, le pourcentage des dons en faveur de l’Eglise catholique (une des cases) a baissé de 39 à 33 %, tandis que celui en faveur des ONG et associations d’intérêt social (l’autre case) est passé de 39 à 43 % et celui d’aucune case cochée de 31 à 33 % (la somme dans ce cas est gardée par l’Etat). Enfin, 11 % des contribuables ont coché les deux cases. En outre, 73 % des Espagnoles utilisent des contraceptifs malgré l’anathème catholique contre leur usage. Et seuls 12 % des 18-24 ans se disent pratiquants (61% en 1975 et 91 % en 1960) et 71 % disent pouvoir se passer de l’Eglise catholique pour croire en Dieu.
Publication reproduite avec l'accord exprès de la Rédaction de Réforme |