Numéro 2938 (2-8 août 2001) de

Forum

Connaissances scientifiques avec conscience

Christian de
MITTELWIHR

 

 

 

 

 

 

© Réforme

Tout citoyen est comptable de ses actions vis-à-vis de la société, malgré le constat de la difficulté d'appréhender la complexité de toute réalité.


Depuis le milieu des années soixante-dix, la spécialisation, notamment dans les sciences, s'est progressivement imposée avec une bienveillance souhaitée de la société. Les résultats de cette politique mettent en exergue des conséquences plus en plus insidieuses. Parce que le spécialiste est devenu ignare de tout ce qui ne concerne pas son étroite spécialité et que le non-spécialiste, dont le politique mais aussi le théologien, n'a plus accès à une connaissance devenue de plus en plus pointue, cette situation paradoxale conduit à une difficulté grandissante pour l'un et de l'autre de réfléchir sur le monde.

En effet, si les résultats scientifiques ont des répercussions directes sur notre vie, la difficulté pour la science de s'imbriquer dans la société est démontrée pas l'impossibilité de faire prendre conscience au politique et au citoyen de se remettre en question pour pouvoir envisager, ensemble avec les scientifiques, des perspectives sociétales. En attestent l'absence de discussion sur les OGM, la génétique, les émissions de gaz à effet de serre... de peur de ne plus pouvoir gaspiller en toute sérénité ! Le développement des recherches scientifiques et surtout l'application et l'exploitation des connaissances nouvelles engagent la responsabilité du citoyen, de tous les citoyens, y compris les scientifiques.

Tous sont-ils conscients de l'imbrication de la science dans la société avant même d'établir une éthique, de la nécessaire formulation du questionnement scientifique? Car, moins les citoyens s'impliquent dans la vie politique et plus les scientifiques ont tendance à poursuivre leurs propres fins, avec une exploitation des nouvelles connaissances pour les bénéfices de quelques-uns. Les multinationales pharmaceutiques fournissent des exemples où l'économie et la récolte de dividendes sont de plus en plus présentes !

Reste alors une interrogation pour une société où les loisirs égocentriques sont devenus un but de vie : comment user du RTT (réduction du temps de travail) avec conscience, à moins de continuer à vivre avec inconscience ?

Christian de Mittelwihr est directeur de recherches au CNRS.

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 Publication reproduite avec l'accord exprès de la Rédaction de Réforme