Numéro 2872 (27 avril-3 mai 2000) de

Forum

Drosophila melanogaster, la mouche du vinaigre...
de son génome à la compréhension de la génétique humaine.

Christian de
MITTELWIHR

 

 

 

 

 

 

© Réforme

La mouche du vinaigre


Le génome d'un organisme contient l'information qui détermine son développement, sa physiologie, en grande partie son comportement. Mais, si cette information, contenue dans l'ADN, est facilement décryptée, elle est très difficile à interpréter. Avec la séquence des nucléotides de l'ADN et le code génétique, on peut déterminer où commence et où se termine un gène. Une bactérie contient entre 4 000 et 10 000 gènes, les levures 7 000, la drosophile 14 000 (son génome a été publié, il y a peu), un nématode 18 000, et l'homme de l'ordre de 100 000. Mais, cette augmentation du nombre de gènes chez les vertébrés est liée a la duplication des chromosomes (tétraploïdie). En fait, les organismes multicellulaires possèdent un petit nombre de gènes définis qui gèrent environ 15 000 fonctions primordiales, héritées des formes ancestrales et ces gènes sont conservés lors de l'évolution. C'est ainsi, que les avancées scientifiques et le développement de la génétique humaine peuvent progresser grâce à la manipulation de gènes homologues (c'est-à-dire conservés) de la drosophile en vérifiant qu'ils contrôlent bien des processus similaires. L'identification par homologie de séquences de gènes mutés chez l'homme avec leurs homologues chez la drosophile est devenu routinier. Il sera bientôt possible de reproduire des maladies héréditaires de l'homme, comme celle d'Alzheimer ou celles responsables de dystrophies musculaires ou encore de certains cancers, et ainsi de déterminer les gènes responsables.

Et voilà que, dans un laboratoire du CNRS, on découvre des gènes «sauteurs», capables de se déplacer dans le génome d'une cellule. Et notre mouche du vinaigre en possède, ils sont mêmes trois fois plus nombreux que chez sa parente Drosophila simulans. Ces gènes «sauteurs» semblent permettre de créer de nouvelles variétés génétiques de mouches capables de s'adapter plus rapidement à un nouveau milieu, donc d'être des mouches colonisatrices ; cela expliquerait pourquoi Drosophila melanogaster est présente dans le monde entier, et pas sa parente D. simulans. Ceci a amené des scientifiques à se demander si le virus du sida ne serait pas l'équivalent de ce gène «sauteur» en se multipliant dans le génome de l'homme qui lui serait l'espèce colonisatrice (à cause de l'accroissement de ses déplacements à travers le monde).
Bigre ! Prochaines vacances ... à la maison !

Christian de Mittelwihr est directeur de recherches au CNRS.

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 Publication reproduite avec l'accord exprès de la Rédaction de Réforme