Numéro 2874 (11-17 avril 2000) de

Forum

Vers un totalitarisme linguistique en Espagne ?
Le mauvais exemple universitaire.

Christian de
MITTELWIHR

 

 

 

 

 

 

© Réforme

¡ Habla el catalán !


De tout temps, les universités ont été des foyers de rébellion à l’«establishment» et des nids à idées progressistes. A fréquenter les universités espagnoles, on constate un immobilisme, voire un rejet des idées nouvelles, avec des causes à la fois historiques et sociales, mais de là à promouvoir un ultra-conservatisme comme dans les universités catalanes (incluant celles de la région de Valence). La linguistique régionale en devient le fer de lance sous prétexte d’autonomie universitaire, une mégalomanie universitaire qui finit par déroger aux lois régionales de politique linguistique et par rejeter l'universalité de la Science et du Langage. Deux exemples.

Le «rector» (président) de l'Université de Tarragone a sanctionné un professeur pour avoir distribué, à des lycéens qui le demandaient, des sujets d’examen écrits en espagnol (et non en seul catalan) lors de la «selectividad» (équivalent du baccalauréat), alors que l’une OU l’autre de ces deux langues, officielles en Catalogne comme dans la Région de Valence, peut légalement ou est censée pouvoir s’utiliser, mais seul le catalan est langue officielle de la Catalogne... et de ses universités !

Dans les nouveaux statuts de l'Université de Valence, un article fait obligation à tout enseignant nouvellement recruté de connaître l’espagnol ET le valencien (catalan) et de se soumettre à un examen de contrôle, un article que refuse d'avaliser la «Generalitat» (équivalent du Conseil Régional).

Paradoxalement, ces universités, comme toutes les autres universités espagnoles, font des gorges chaudes contre l’«endogamia», c'est-à-dire le recrutement interne dans chaque université. Autonomie et liberté ne font pas bon ménage en Espagne, comme en Corse ! Que de grandes et vénérables universités comme celles de Barcelone ou de Valence qui devraient promouvoir le savoir-faire et les recherches de leurs propres régions, au moins à travers l’Europe, se referment sur leur minuscule périmètre linguistico-autonomiste est un comportement rétrograde, professeurs et étudiants en portent ensemble la responsabilité.

L’espagnol est la 4e langue internationale, bien avant le français... Quant au catalan !
A propos, et le corse, qu'en pensent les enseignants et étudiants de Corte ?

Christian de Mittelwihr est directeur de recherches au CNRS, chargé de cours à l’Universitat de València (Espagne) depuis 15 ans.

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